Pour sonder le mythe de Tristan et Iseut, j'ai lu deux livres qui se sont avérés bien complémentaires. Le premier a été rédigé au XIIe siècle par Béroul. Le second a été écrit en 1900 par le médiéviste Joseph Bédier. Il s'agit d'un contexte idéal pour la lecture comparative.
D'une part, le début et la fin de l'histoire ont été tronqués dans la version de Béroul. Certaines phrases demeurent incomplètes et confèrent au texte un aspect fragmenté. La version de Joseph Bédier permet d'avoir une vue globale du mythe, de la naissance de Tristan à la mort des deux amants. Toutefois, elle ne respecte pas toujours la tradition médiévale, car elle s'éloigne de l'oralité. Afin de s’en faire une idée, il est intéressant de lire les deux récits.
Chez Béroul, on ressent bien l'influence des jongleurs du Moyen Âge, qui récitaient des vers sur la place publique. La parole est centrale et constitue la majorité du texte : nombreux dialogues, discours longs et étoffés. De plus, le narrateur omniscient insère des commentaires, multipliant les appels au lecteur. Cela donne l'impression d'être en présence d'un conteur, vif et enjoué. Tandis que le roman grec favorisait le voir, ce roman médiéval est pleinement dans le dire. Il se distingue également de la prose de Bédier par son ton humoristique. Les scènes burlesques, telles que cet épisode où les barons de la cour s'enfoncent dans la boue, montrent agilement l'espièglerie d'une situation. Malgré son état fragmentaire, ce récit s'avère quelquefois plus détaillé : l'effet du philtre d'amour cesse d'agir après trois ans, un élément escamoté par Bédier. Cela permet de mieux comprendre certains passages.
Chez Béroul, on ressent bien l'influence des jongleurs du Moyen Âge, qui récitaient des vers sur la place publique. La parole est centrale et constitue la majorité du texte : nombreux dialogues, discours longs et étoffés. De plus, le narrateur omniscient insère des commentaires, multipliant les appels au lecteur. Cela donne l'impression d'être en présence d'un conteur, vif et enjoué. Tandis que le roman grec favorisait le voir, ce roman médiéval est pleinement dans le dire. Il se distingue également de la prose de Bédier par son ton humoristique. Les scènes burlesques, telles que cet épisode où les barons de la cour s'enfoncent dans la boue, montrent agilement l'espièglerie d'une situation. Malgré son état fragmentaire, ce récit s'avère quelquefois plus détaillé : l'effet du philtre d'amour cesse d'agir après trois ans, un élément escamoté par Bédier. Cela permet de mieux comprendre certains passages.
Néanmoins, le style de Béroul ne possède pas la grâce de Bédier, que j'ai préférée pour ses descriptions nuancées et poétiques. Les brumes de Cornouailles, ses forêts et ses falaises ajoutent un côté tourmenté, plus romantique et épique, à cette tragédie. Bédier illustre davantage les décors et les costumes. La lecture de cette version est d'ailleurs conseillée avant de lire celle de Béroul. Outre le fait que la légende est racontée dans son entièreté, les images paraissent mieux servir la tension narrative de ces aventures. Cependant, la fin tragique de Bédier semble apporter une note plus moralisatrice au destin passionné du couple illégitime. Que l'on considère Tristan et Iseut comme un roman sur l'adultère ou sur l'amour-passion, que l'on se range du côté des amants ou du roi Marc, on ne peut rester indifférent à ce mythe transhistorique. Il permet une réflexion sur les rapports de féodalité de l'époque, mais aussi sur la sexualité. C'est sur ce dernier point qu'il s'éloigne de l'amour courtois, où le désir était sans cesse différé à plus tard.
En somme, j'ai préféré la version de Bédier pour son style et pour le fait que l'histoire est narrée dans son intégralité. Par contre, je suis ravie d'avoir lu la version de Béroul, car elle n'est pas teintée d'une morale chrétienne et elle reflète bien le ton des troubadours.
En somme, j'ai préféré la version de Bédier pour son style et pour le fait que l'histoire est narrée dans son intégralité. Par contre, je suis ravie d'avoir lu la version de Béroul, car elle n'est pas teintée d'une morale chrétienne et elle reflète bien le ton des troubadours.
Bibliographie :
Béroul, Tristan et Iseut, Livre de poche, 159 pages
Joseph Bédier, Le roman de Tristan et Iseut, 10/18, 184 pages.
J'ai lu la version de Bédier il y a fort longtemps et l'avais beaucoup apprécié. Je n'ai pas contre jamais comparé avec la version de Béroul qui traîne dans ma PAL depuis mon bac (oui, je l'avais au programme de Lettres mais me suis payée le luxe de ne pas le lire. Qu'on est bête quand on est jeune hein :D). Je note ton excellente comparaison pour m'inciter à m'y coller prochainement !
RépondreSupprimerHihi, j'aurais probablement fait la même chose à cet âge. La version de Bédier est très belle. Celle de Béroul permet de s'approcher des origines et de constater l'évolution du mythe à travers les époques. Tu me diras si tu la lis. On pourra s'en reparler :)
SupprimerJ'adore ce texte et aime beaucoup travailler dessus avec mes trolls
RépondreSupprimerC'est une légende magnifique et les enseignants jouent un rôle essentiel dans sa transmission. Merci Moka d'en discuter avec tes trolls :)
SupprimerSouvenirs d'adolescence quand j'étudiais des passages en classe. Je n'ai jamais lu le récit en entier. Il faudra que j'y pense.
RépondreSupprimerJe te conseille vivement la reconstruction de Joseph Bédier. Tu verras sûrement le mythe d'une manière différente à l'âge adulte. Bonne future lecture Argali :)
SupprimerJ'avais lu la version moderne de René Louis et cela m'avait donné envie de comparer avec d'autres versions. Tu remets ce projet en lumière :)
RépondreSupprimerhttp://pausekikine.blogspot.ca/2010/11/tristan-et-iseult-version-en-francais.html
Merci pour le lien vers ton billet. J'adore ton enthousiasme ! Si tu as aimé cette histoire, tu devrais lire la version de Bédier. Elle est sublime :)
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