14 avril 2013

Kamouraska

Auteur : Anne Hébert
Titre : Kamouraska
Éditeur : Points
Parution :1970
Format : 246 pages

Résumé :

Une femme au visage blême erre dans les couloirs d'une grande maison lugubre, laissant glisser sa longue robe noire sur le plancher glacé. Dans les revers de sa jupe, elle transporte ses spectres et ses secrets.

Élisabeth d'Aulnières reçut une éducation stricte, baignant dans le catholicisme et les bonnes manières. À 16 ans, elle épousa Antoine Tassy, seigneur de Kamouraska. Très tôt, elle découvrit le penchant de son conjoint pour la bouteille et les femmes. Malheureuse, elle tomba malade et devint amoureuse de son médecin, le docteur Nelson. Une passion inassouvie qui poussa les deux amants à commettre l'irréparable.

Accusée du meurtre de son époux, Élisabeth retrouve son honneur en offrant sa main à Jérôme Rolland, un notaire respectable de Québec. Le roman débute, alors qu'elle veille au chevet de son mari agonisant. Épuisée, en proie à des cauchemars et des visions, elle redoute d'être incriminée une deuxième fois, elle qui est pourtant devenue une épouse parfaite et sans tache.

Ce que j'ai aimé :

-Ce récit ressemble, au premier abord, à une femme qui fuit, insaisissable, par sa construction narrative qui enchevêtre la chronologie des événements. Puis, le portrait se précise et s'intensifie, livrant au miroir des ombres grandissantes. C'est une écriture sombre et inquiétante, mais qui fait preuve d'une maîtrise romanesque remarquable.

-Le contraste entre agitation et immobilité est très intéressant. Dans ses souvenirs, Élisabeth déménage, répond à des réactions en chaîne, se débat dans un destin qui déferle, sauvage et ardent. Au temps présent, par contre, elle est complètement éteinte. Elle se retire dans une chambre et tourne son visage contre le mur. C'est de là, qu'elle nous racontera son passé, la tête déposée sur l'oreiller.

-La mort est omniprésente dans ce roman. Tout d'abord, le tout se déroule en hiver, une saison évoquant la solitude, le désespoir. Dans ses souvenirs, le fantôme d'Élisabeth rôde, revisitant les lieux du crime ou observant son procès, de façon muette et transparente. La mort, c'est aussi l'amour qui a quitté son coeur, lorsque son amant s'éclipse pour échapper à la justice.

-La folie n'est jamais très loin. Son délire déclenche l'apparition de témoins importants, tel qu'Aurélie Caron, sa domestique qui prend, par moments, l'aspect d'une sorcière. Ces hallucinations viennent troubler l'espace et le temps, se refermant sans cesse sur la narratrice, comme une bête traquée.

-Il n'est pas étonnant que ce classique de la littérature québécoise soit sujet de thèses et d'études, car il est très riche, sur le plan psychologique, sociologique et historique. Il a été publié en 1970, mais l'histoire se déroule vers 1830, tandis que la ville de Sorel porte le nom de William-Henry, un prince britannique. Bref, ce n'est pas une lecture facile, mais il s'agit d'un roman marquant et brillamment construit.

Extraits favoris :

« Ma mère en grand deuil me porte dans son ventre, comme un fruit son noyau. »

« La paix, un jour, sera cachée dans un compliment, comme une amande dure. »

« Rêver, m'échapper, perdre de vue l'idée fixe. Relever mon voile de deuil. Regarder tous les hommes, dans la rue. Tous. Un par un. Être regardée par eux. Fuir la rue du Parloir. Rejoindre mon amour, à l'autre bout du monde. »


2 commentaires:

  1. J'ai tellement aimé ce roman! L'ensemble de l'oeuvre de Hébert est intéressant, mais cet ouvrage réussit à nous faire éprouver toute une gamme d'émotions! Bon choix Topinambulle!

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    1. @ Catherine : Je suis contente qu'on partage cet intérêt pour l'oeuvre d'Anne Hébert. Merci pour ton passage Catherine :)

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