15 mars 2015

Le 18e siècle romantique

© Caspar David Friedrich
Je poursuis la lecture du recueil de textes critiques pour mon cours avec des extraits de l'anthologie de Jacques Bousquet, Le 18e siècle romantique. Ces textes mettent en contexte le changement opéré dans la sensibilité avant même le romantisme du 19e siècle. Au fil de mes lectures, j'ai également constaté cette évolution qui a permis une affirmation toujours plus forte du sentiment amoureux. Je suis ravie d'un peu mieux connaître ce siècle maintenant !

Le déchaînement des passions

-Dans toutes les civilisations, l'humanité avait tenté de contrôler ses émotions et de domestiquer ses passions. La rupture des digues, au 18e siècle, constitue donc un fait important dans l'histoire littéraire. On en perçoit les signes avant-coureurs dans certaines œuvres du 17e siècle, comme les Lettres portugaises (1669) et Phèdre (1677), où la passion est tellement irrésistible que la défense devient vaine. Cette tendance s'accentue au début du 18e siècle avec Manon Lescaut (1731).

-Entre 1740 et 1750, les derniers scrupules disparaissent : « Nos passions sont innocentes ». La passion cesse d'être coupable et devient une vertu, car l'amour marque le début de la vie spirituelle : « L'amour m'a métamorphosé, vous m'avez créé une âme ». La passion est synonyme de génie (« Il n'y a que les passions qui fassent penser ») et de regain de vie (« Ne pas aimer, ce n'est pas vivre »). La passion est, de ce fait, au-dessus des lois morales : « Tout ce que la passion inspire, je le pardonne ». Dès lors, c'est la résistance à la passion qui devient répréhensible : « L'homme sans passions est une statue ».

Le mythe du bon sauvage

-Le culte de la passion a été grandement facilité par le prestige qu'avaient acquis les notions d'instinct et de nature. La défense de la vie naturelle contre les excès de la civilisation sera liée au nom de Jean-Jacques Rousseau. La vie simple des peuples primitifs est considérée comme plus heureuse que la vie artificielle des civilisés. Le « bon sauvage » possède, en effet, ce bien suprême : la liberté.

La critique de la société et l'exaltation de l'individu

-Le préromantisme prendra ses héros parmi des individus marginaux, estimés comme plus libres par leur écart de la société : hors-la-loi révolté, brigand, prostitué. C'est aussi à cette époque que la littérature commence à s'intéresser aux fous.

-Toute société est considérée comme l'ennemie de l'individu. La loi du romantique est d'être seul et différent, même si c'est au prix du malheur. S'il se plaint de sa différence, il s'agit d'une hypocrisie. L'infortuné est fier de se distinguer par son triste sort.

La sensibilité

-Jusqu'alors l'homme cherchait à faire son devoir. Désormais, ce qui importe avant tout c'est d'être soi-même, de sentir fortement son moi et de vivre intensément. Chacun veut être plus sensible que le voisin, car la sensibilité est un surcroît de vie : « Plus je sens vivement, plus je sens que je suis ». La sensibilité est vue comme la source de toute vérité et de tous les plaisirs.

-À cette époque, les mots « sensible » et « sentiment » se vendent bien. Ils se retrouvent dans les titres des livres et une coiffure appelée « pouf aux sentiments » est même lancée. Les âmes sensibles commencent à s'intéresser aux animaux. On s'attendrit sur les enfants. C'est aussi le début de la bienfaisance. On prend la défense des pauvres et des opprimés. Cette bienfaisance fait couler de douces larmes et provoque des effusions lyriques.

Pouf aux sentiments

Source bibliographique : Jacques Bousquet, Le 18e siècle romantique, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1972, p. 20-37.

2 commentaires:

  1. Bravo pour ta persévérance, je te lève mon chapeau. Merci pour tes belles découvertes que tu nous partages avec passion.

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