Titre : Sur le fil
Éditeur : Triptyque
Parution : 2013
Format : 103 pages
Résumé :
Dans son premier recueil de nouvelles, Maude Déry explore le thème de la perte, en laissant la scène à quinze solistes vacillants. En observant cette chorégraphie de la fragilité, nous avons l'impression d'assister à un ballet onirique, de coquilles légères et diffuses, emportées par une invisible grâce. Des êtres s'abandonnant au silence comme des oiseaux blessés, suite à la perte d'un être aimé, de leur mémoire.
Comme chez Aude, Esther Croft ou Christiane Frenette, ses personnages traversent des zones sombres, constrastant avec une écriture diaphane et lumineuse. Confrontés à la souffrance, certains choisissent le déni, tandis que pour d'autres, une épiphanie ouvre un véritable chemin vers soi. Sensuelle et délicate, la plume de Maude Déry porte une attention particulière à la psyché humaine et à la réconciliation des dualités. D'une troublante beauté !
Le jeu des miroirs, offrant de multiples visages, m'a beaucoup plu dans ce recueil. Nous avons d'abord celui de l'enfance, frêle et cassant, qui raconte le passé et les souvenirs. En surface, nous retrouvons celui des banalités, des automatismes, des apparences éphémères. Plus profondément, se cachent les monstres, les démons intérieurs et les non-dits. Tel un tourbillon, la narration épouse ces différentes strates, pour brouiller un peu les cartes.
Des forces contraires se rencontrent, des pulsions naissent, des murmures se font entendre. Grâce à des images fortes, la charge émotive de ces histoires nous ébranle. L'auteure dénude subtilement les chrysalides, transperce les fausses enveloppes, afin d'atteindre le coeur d'une douleur. Elle révèle tranquillement les secrets cachés d'un visage dans « Où tout a commencé » ou la cause d'une invalidité dans « Hommage à Rosa Luxemburg ». Le choc final est réussi.
Sur un autre ton, une douceur se dégage de « Points de fuite », le récit d'un vieux couple séparé par la maladie d'Alzheimer. J'ai aussi apprécié l'utilisation des symboles, alors qu'elle détaille les écailles d'une séductrice dans « La femme-serpent » ou les ailes d'une ballerine dans « Le théâtre des Demoiselles ». Évoquant autant la gravité que la légèreté, Maude Déry tisse une toile soignée, aussi claire qu'un matin d'hiver. Si vous aimez les nouvelles intimistes, sondant les méandres de l'inconscient, vous serez ravis !
Extraits favoris :
« Lorsque la musique entame ses premières mesures, mon corps se cambre, mes hanches suivent le tempo, mes bras forment des arabesques graciles. Mes jambes obéissent aux plaintes du violon. Mes ailes poussent, la soie se froisse, me voilà funambule. »
« Ton masque, déjà craquelé, tombe. Trois lignes pourpres ressurgissent pendant que tu dénoues le noeud de ta robe, fais glisser la fermeture éclair. Le tissu rouge rencontre la céramique blanche. Puis c'est au tour des souliers, du pendentif entre tes seins, de ta broche émeraude. »
On dirait presque de la poésie... à moins que ce ne soit toi qui soit un peu poète... :-)
RépondreSupprimerOui, Maude Déry a une écriture très poétique. Comme le vent dans une voile, c'est une plume inspirante, envoûtante. Cela m'a beaucoup émue ! :)
SupprimerIl est bien hein! J'ai adoré cette écriture!
RépondreSupprimerJe te comprends :) La rencontre d'un sujet profond comme la perte avec cette plume délicate, c'est de toute beauté !
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