Titre : La logeuse
Éditeur : Marchand de feuilles
Parution : 2006
Format : 311 pages
Résumé :
Rosa, une jeune gaspésienne socialiste, quitte son village pour découvrir la métropole et faire souffler le vent d'ouest vers sa région. Sur son chemin, elle rencontre un groupe d'effeuilleuses cosmopolites, puis déniche un emploi comme réceptionniste dans un hôtel de passe. La nuit, elle apprend des mots en russe, en espagnol et en chinois, avec en toile de fond l'effervescence et les lumières du boulevard Saint-Laurent. Le jour, elle loge chez Jeanne Joyal, une femme politisée qui ne jure que par la chanson française, la Révolution tranquille et les romans historiques de Michou Minou. Cette fable rigolote, mettant en scène une galerie de personnages biscornus, montre que l'amitié ne connaît ni frontière ni origine.
Ce que j'ai aimé :
Ce que j'ai aimé :
Avec La logeuse, Éric Dupont signe son roman le plus engagé. Il aborde des thèmes sérieux avec un humour léger. À la manière de Voltaire, il dénonce de façon satirique les travers de la société. L'auteur prône une ouverture aux autres cultures, plutôt qu'un chauvinisme excessif et aveugle. Avant même la Commission Bouchard-Taylor, Éric Dupont se penche sur des questions épineuses, reliées à l'identité et à la diversité culturelle. Le fait d'être revenu au Québec après quinze ans d'absence lui permet d'avoir un certain recul sur ce qui s'y passe et de proposer des idées audacieuses. Le tout est servi avec une désinvolture et une fantaisie rafraîchissantes, qui évitent ainsi le piège de la lourdeur.
Ce livre m'a procuré un grand plaisir de lecture, puisqu'il allie le réalisme au merveilleux, le traditionnel au contemporain. J'ai un faible pour le style de l'auteur, à la fois sensible et bouillant, pour son coeur enfantin et excentrique. Depuis que je le lis, je savoure cette fertilité langagière, son imaginaire éclaté. Éric Dupont fait confiance au lecteur, puisqu'il s'amuse avec les jeux de mots, les symboles et les allégories. Dans La logeuse, il insère aussi des pastiches littéraires, des lettres de scrabble et des cartes postales. J'en viens même à lui pardonner son dernier chapitre, très déroutant avec ces révélations en chaîne, tant j'ai été transportée par la spontanéité de son écriture. Brillant et farfelu !
Extrait favori :
« Rosa sentait un léger souffle sur sa peau, c'était le remous de l'air causé par les immenses ailes des oies. Peu à peu, l'asphalte sale se couvrit d'un tapis de duvet blanc que perdaient les oiseaux dans leur vol frénétique. Les femmes en avaient dans les cheveux, les petites plumes s'accrochaient dans les moustaches des Portugais qui, les yeux mouillés de larmes, avaient oublié, l'espace de deux heures, qu'ils ne reverraient jamais les Açores. Une Irlandaise oublia les blessures des enfants de son île et croisa ses mains sur son coeur roux. Une Juive pensa au Christ sur la croix, un prêtre jeta par terre son col romain et pleura en murmurant, entre deux sanglots : Treblinka. La dernière des oies traîna son vol lent devant la foule en état d'hypnose. On ne respirait plus. On ne croyait plus. On ne narguait plus. On était. »
Ce livre m'a procuré un grand plaisir de lecture, puisqu'il allie le réalisme au merveilleux, le traditionnel au contemporain. J'ai un faible pour le style de l'auteur, à la fois sensible et bouillant, pour son coeur enfantin et excentrique. Depuis que je le lis, je savoure cette fertilité langagière, son imaginaire éclaté. Éric Dupont fait confiance au lecteur, puisqu'il s'amuse avec les jeux de mots, les symboles et les allégories. Dans La logeuse, il insère aussi des pastiches littéraires, des lettres de scrabble et des cartes postales. J'en viens même à lui pardonner son dernier chapitre, très déroutant avec ces révélations en chaîne, tant j'ai été transportée par la spontanéité de son écriture. Brillant et farfelu !
Extrait favori :
« Rosa sentait un léger souffle sur sa peau, c'était le remous de l'air causé par les immenses ailes des oies. Peu à peu, l'asphalte sale se couvrit d'un tapis de duvet blanc que perdaient les oiseaux dans leur vol frénétique. Les femmes en avaient dans les cheveux, les petites plumes s'accrochaient dans les moustaches des Portugais qui, les yeux mouillés de larmes, avaient oublié, l'espace de deux heures, qu'ils ne reverraient jamais les Açores. Une Irlandaise oublia les blessures des enfants de son île et croisa ses mains sur son coeur roux. Une Juive pensa au Christ sur la croix, un prêtre jeta par terre son col romain et pleura en murmurant, entre deux sanglots : Treblinka. La dernière des oies traîna son vol lent devant la foule en état d'hypnose. On ne respirait plus. On ne croyait plus. On ne narguait plus. On était. »
Lu dans le cadre de Québec en septembre
J'avais bien aimé une bonne partie de "La fiancée américaine" et ton billet m'attire.
RépondreSupprimerLe Papou
Je vous le conseille, pour le talent de conteur à la fois chaleureux et érudit d'Éric Dupont. Ce livre m'a beaucoup fait réfléchir sur le vivre ensemble au Québec. C'est drôle, profond et irrévérencieux !
SupprimerBonsoir Topinambulle,
RépondreSupprimerJe suis bien contente d'avoir lu cette appréciation de la Logeuse.
J'avais longtemps hésité à ma librairie de quartier avant d'opter pour un classique de la littérature longueuilloise.
Maintenant, je sais ce que je vais offrir à mon papou à Noël.
Merci de ta visite, Aquicot ! Connaissant un peu les goûts de ton papou, je crois que cet imaginaire foufou lui plaira bien :)
SupprimerJ'avoue être davantage tentée par "La fiancée américaine" d'Éric Dupont mais ta façon d'en parler donne tout de même envie :)
RépondreSupprimerJ'ai aimé tous les livres d'Éric Dupont. "La fiancée américaine" est peut-être son oeuvre la plus mature, car elle couvre un siècle d'histoire. Mais, j'ai eu un plaisir fou à lire tous les autres aussi :)
SupprimerLa thématique ne m'interpelle pas forcément mais par contre, j'adore le style de l'extrait que tu cites !
RépondreSupprimerCe livre a une certaine portée politique, et disons que ce n'est pas ma tasse de thé habituellement. Mais, j'ai été vraiment enchantée par le style baroque d'Éric Dupont, par son talent de conteur :)
SupprimerSi tu veux découvrir son univers romanesque, je te conseille aussi son petit dernier, "La fiancée américaine", qui est paru récemment en France aux éditions du Toucan. C'est fabuleux !