Titre : Mémoires d'outre-tonneau
Éditeur : Boréal
Parution : 2010
Format : 148 pagesRésumé :
Premier roman de Victor-Lévy Beaulieu publié en 1968, alors qu'il était dans la jeune vingtaine, Mémoires d'outre-tonneau raconte la légende de Satan Belhumeur, un homme qui a quitté Montréal pour aller vivre dans un tonneau aux abords de Trois-Pistoles.
Évadé de l'asile St-Jean-de-Dieu, Satan est craint et ostracisé par les habitants du comté. Accusé de tous les maux, il résiste dans son antre, lieu d'exil intérieur. De son humble demeure, il nous livre sa révolte, sa quête de sens et son urgence d'écrire.
Ce que j'ai aimé :
-Sachant que j'allais passer mes vacances dans la région des Basques, je tenais mordicus à emporter avec moi un livre de Victor-Lévy Beaulieu. Ce livre, je l'ai lu à la lueur d'une lampe au propane, sous le ciel étoilé, près de l'odeur musquée des algues et de la danse des braises. Cela m'a mise dans l'ambiance pour me faire murmurer du légendaire, me faire miroiter des chimères et des sombres créatures. Avec ce roman, Victor-Lévy Beaulieu nous fait entrer dans un conte intime, une grotte aux luisances de l'enfer où se mêlent l'enfance, la folie et la passion pour l'écriture.
-Premier tome d'une oeuvre littéraire monumentale, on retrouve déjà dans ce roman une imagination débridée, une langue nouvelle qui nous offre des mots inventés, très sonores. Satan Belhumeur est un idéaliste qui veut ébranler le statut quo du train-train quotidien et la pétarade des biens-pensants. Il cherche sa place de par le monde, n'ayant pas trouvé la satisfaction escomptée lors de son passage à Paris ou dans les tours à bureaux de Montréal. Il reste un être incompris, qui ne se soumet à personne, sauf à sa fille Petite Chatte et à sa compagne Lumina, l'ensorceleuse. On le sent qui s'interroge et qui réfléchit sous cette couche de furie, enflammée de fabuleux. J'ai été séduite par l'humour, l'audace et l'originalité de son verbe provocateur. Puis touchée par cette recherche de vérité, loin des futilités et des mascarades.
-Lors de notre passage à Trois-Pistoles, j'ai visité La Maison de l'écrivain, où on retrouve sa vieille machine à écrire Underwood et plusieurs de ses manuscrits. J'ai eu beaucoup de plaisir à feuilleter une première version de Mémoires d'outre-tonneau qui contenait des notes et des corrections, à découvrir le choix de tel mot plutôt qu'un autre, à réaliser tout le travail derrière. C'est avec respect que j'ai refermé le cahier et que je me suis dit : Chapeau, VLB !
Extraits favoris :
« Je refuse la description.
Je ne parlerai jamais des paysages.
Je tairai la vie physique.
L'important ne se tapit pas là-dedans.
L'important est ailleurs que dans ces arbres, ces bosquets, ces vallons, ces plaines, ces maisons en forme de citrouilles comme les aiment les Pistolets, ces visages aux yeux bleus, bruns, jaunes, ces visages sans yeux, ces femmes grosses, ces femmes cocufiantes, cette beauté des choses, cette singularité des monstres ou des génies ! L'important, c'est ce qui n'a jamais été dit. C'est ce qui ne peut se dire. L'important, c'est ce monde étrange, silencieux et impersonnel qui me porte et que je porte. »
« Fatigue, sueur, graisse, oui cette graisse que la fatigue de mon corps fait fondre de mon corps même, ces battements las et irréguliers de mon coeur dans la petite chambre d'hôtel où je me repose après avoir été dans les pyramides d'Égypte, prié dans le temple d'Isis, photographié devant l'icône de Russie...tout ce sable, toute cette boue, toutes ces lamentations, toute cette lassitude, toute cette espérance défaillante...tout tout tout tout cela m'a-t-il rendu plus sage ? Tout tout tout tout tout tout cela m'a-t-il enseigné l'existence, le temps, l'espace, l'étendue et la profondeur, même relativement ? »
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