19 décembre 2014

La ballade d'Ali Baba

Auteur : Catherine Mavrikakis
Titre : La ballade d'Ali Baba
Éditeur : Héliotrope
Parution : 2014
Format : 212 pages

Résumé :

Repéré chez Karine, ce livre a été l'occasion, pour moi, d'une première rencontre avec la plume de Catherine Mavrikakis, qui publie pourtant son sixième roman. J'ai beaucoup aimé cette lecture, où l'auteure apprivoise le deuil de son père en peignant son portrait volatil, parfois grave ou joyeux, étourdissant et fabuleux. Il débute par une virée éclair de Montréal à Key West, alors que Vassili désire présenter la mer à ses filles – lui qui l'a bien connue dans son enfance en Grèce et à Alger, par ses voyages en Italie ou à Marseille. On revient, par périodes, à Montréal. Une belle légende !

Ce que j'ai aimé :

Ce qui m'a le plus frappée dans ce roman, c'est l'utilisation soignée de la couleur. On retrouve, comme un leitmotiv, des touches de rouge (renard, sac, voiture, homard). Elles pimentent un océan de bleu : le turquoise de Key West, les toits de la Grèce. Des pattes de mauve, d'orangé, de rose complètent la palette. On croirait voir miroiter les reflets chatoyants d'une caverne d'Ali Baba. Ces vifs coloris, associés aux souvenirs de la narratrice, contrastent avec le climat gris et enneigé de Montréal, où est campé son état présent.

« Ma vie n'a plus ou pas encore de sens. Pourtant, je cours après le passé qui ne cesse de se multiplier devant moi, de s'effilocher en souvenirs vrais ou inventés, en possibilités menées à terme ou encore avortées. Sa fuite effrangée me fait mal, je crois. »

Une autre force du récit se trouve dans le visage protéiforme du père, nommé Vassili Papadopoulos, allant du crooner séduisant au vieil homme malade. Ce portrait fluctuant d'une figure paternelle qui se dérobe constamment, nous le reconnaissons aussi dans les morceaux éparses du texte, passant du passé au présent, de ville en ville, tel les pointillés d'une constellation inachevée. Loin de m'importuner, j'ai aimé ce non finito, ces tableaux en suspens. Érina observe : « Mon père avait toujours été un revenant. Jamais là, mais toujours susceptible de réapparaître ». En optant pour un voyage chimérique et scintillant, Catherine Mavrikakis a rendu un dernier hommage à celui qui ne voulait se laisser saisir facilement.

Lire l'avis de : Karine et Jules.

Extrait favori :

« Au bout du chemin, à Key West, il y aurait la modeste chambre d'un motel tout confort donnant sur la mer, des matelas défoncés qui grinceraient au moindre mouvement, de la plongée sous-marine de fortune avec des masques, des harpons et des palmes gigantales, et puis des jeux et des cris à travers les récifs orangés. Au bout du chemin, il y aurait des châteaux de sable géants, des tortues de mer matriarches, des algues enchevêtrées, des méduses mauves antédiluviennes et des hamacs troués, renversés, dont les attaches s'entortilleraient langoureusement contre un palmier. »


6 commentaires:

  1. Je ne sais pas. Me semble très triste ce roman....

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    1. Il y a un côté nostalgique, mais c'est aussi très lumineux. C'est un roman sur le deuil, avec une bonne dose de merveilleux. Je l'ai trouvé plus touchant que triste, alors ça devrait aller :)

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  2. Moi aussi j'ai trouvé ce roman plus touchant que triste! Le deuil peut mettre beaucoup de temps à venir et je suis contente qu'Érina y parvienne...

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    1. Oui, le deuil peut nous habiter longtemps et c'est pourquoi j'ai trouvé la fin de ce roman vraiment très belle ! Douces bises, chère Jules :)

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  3. D'accord avec vous... plus touchant que triste... mais j'ai beaucoup aimé. Je vais le relire avec ces couleurs en tête, Topinambulle!

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    1. Oh super ! Je ne sais pas si c'est un hasard, toutes ces belles couleurs, mais j'ai trouvé la palette magnifique. Merci pour cette découverte :)

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