13 février 2014

Typologie du roman policier

Tzvetan Todorov
Je suis présentement dans la lecture de l'anthologie critique du cours LIT-4001, Littérature de masse. Ce billet est donc le premier d'une série sur la théorie littéraire.

Dans « Typologie du roman policier », Tzvetan Todorov met en évidence trois genres à l'intérieur du roman policier : le roman à énigme, le roman noir et le roman à suspense.

Source bibliographique : Todorov, Tzvetan. « Typologie du roman policier », Poétique de la prose, Paris, Seuil, 1980, pp. 9-19.

Résumé de l'article :

1) Roman à énigme :


  • Ce roman contient deux histoires : l'histoire du crime et l'histoire de l'enquête.
  • La première histoire, celle du crime, est terminée avant que ne commence la seconde, celle de l'enquête.
  • L'histoire du crime raconte « ce qui s'est effectivement passé », alors que l'histoire de l'enquête explique « comment le lecteur (ou le narrateur) en a pris connaissance ». 
  • Ce ne sont pas deux histoires différentes, mais deux aspects d'une même histoire, ce sont deux points de vue sur la même chose.
  • L'histoire de l'enquête sert de médiateur entre le lecteur et l'histoire du crime.
  • Le détective examine indice après indice, piste après piste.
  • Les personnages principaux (le détective et son ami, le narrateur) sont immunisés.
  • Ce roman termine souvent un chapitre par une révélation particulièrement surprenante.

Quelques titres :

  • Le chien des Baskerville d'Arthur Conan Doyle
  • Le Crime de l'Orient-Express d'Agatha Christie
  • Le mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux

2) Roman noir :


  • Ce n'est plus un crime antérieur au moment du récit qu'on nous relate, le récit coïncide maintenant avec l'action.
  • Le détective risque sa santé, sinon sa vie.
  • Il y a souvent plus d'un détective et plus d'un criminel.
  • Les descriptions connotent la froideur, sinon le cynisme.
  • Les comparaisons évoquent une certaine rudesse.
  • Sa caractéristique principale est thématique. On y trouve de la violence, un crime souvent sordide, des personnages immoraux.
  • Le mystère garde une fonction secondaire, subordonnée et non plus centrale, comme dans le roman à énigme.
  • Ce roman ne réserve pas ses surprises pour les dernières lignes du chapitre.

Quelques titres :

  • Le grand sommeil de Raymond Chandler
  • Le faucon maltais de Dashiell Hammett
  • La reine des pommes de Chester Himes

3) Roman à suspense :


  • Le roman à suspense combine les propriétés des deux autres genres.
  • Du roman à énigme, il garde le mystère et les deux histoires, celle du passé et celle du présent; mais il refuse de réduire la seconde à une simple détection de la vérité.
  • Comme dans le roman noir, le présent prend la place centrale.
  • Le mystère est un point de départ, mais l'intérêt principal vient de la seconde histoire, celle du présent.
  • On s'interroge aussi bien sur l'avenir que sur le passé.
  • Il y a la curiosité de savoir comment s'expliquent les événements déjà passés, mais il y aussi le suspense de voir ce qui va arriver aux personnages principaux.
  • Les personnages principaux risquent leur vie sans cesse.
  • On retrouve deux sous-types du roman à suspense : « l'histoire du détective vulnérable » (le détective est intégré à l'univers des autres personnages, au lieu d'en être un observateur indépendant) et « l'histoire du suspect-détective » (le personnage principal doit prouver son innocence en trouvant lui-même le vrai coupable).

Quelques titres :

  • Celle qui n'était plus de Boileau-Narcejac
  • La mariée était en noir de William Irish
  • Vivement dimanche ! de Charles Williams

2 commentaires:

  1. Quel beau cadeau de Saint-Valentin tu nous as fait avec ce billet ! Merci Topi. J'ai lu ton article hier en fin de journée et nous en avons parlé toute la soirée! :-) JJ est friand de tous ces essais. Dernièrement, il a lu un livre dans lequel Agatha Christie décortique son processus d'écriture. Je crois qu'il l'a relu au moins trois fois.
    De mon côté, j'ai été amusée de voir que ma très vague idée exprimée bien maladroitement dans mon billet sur « La cité des jarres » avait un petit quelque chose de pas si fou !
    Ce billet est excellent. J'ignore si l'article d'origine est touffu ou pas, mais tu en fais un résumé limpide qui constitue un outil précieux. Si précieux que j'aimerais le faire connaître plus largement. Serais-tu d'accord pour que j'ajoute un lien vers ton article depuis mon billet sur « La Cité des jarres » ? Je n'ai pas pensé à la manière exacte de le faire, mais ce serait du type : « Pour aller pus loin... ».
    Nous avons hâte de lire les prochains billets de la série « Théorie littéraire ». Encore mille mercis Topi... de nous deux !

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    1. Oh que ça doit être intéressant ce livre d'Agatha Christie ! L'article de Todorov fait une dizaine de pages, mais ces notes ont beaucoup aidé à ma compréhension. Je suis ravie que ça vous ait plu et tu peux ajouter un lien sans problème ! Bon dimanche à vous deux et à Théo aussi :)

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