6 avril 2014

Le sort de Bonté III

Auteur : Alain Poissant
Titre : Le sort de Bonté III
Éditeur : Éditions Sémaphore
Parution : 2013
Format : 92 pages

Résumé :

Dans la campagne de Napierville, Francis, un producteur laitier, aimerait bien trouver une compagne pour partager son quotidien. De son côté, Graziella, une ex-employée de banque ayant été victime d'un vol à main armée, essaie de refaire sa vie au village. Après une période d'itinérance, elle décide de se prendre en main, de subvenir aux besoins de son fils. Elle accepte des contrats de peinture, alors que la construction résidentielle explose en zone agricole. Puis, elle tombe sur l'annonce de Francis : « Homme cherche femme ».

Entre le premier appel téléphonique et la rencontre amoureuse, il y a tout un chemin, tout un roman. D'un chapitre à l'autre, l'auteur Alain Poissant se concentre sur un personnage : Francis, Graziella, le Petit, Marquis, le Soudeur, Sam Samson, le Vieux. Ils forment l'entrelacs, sans illusion et sans complaisance - mais néanmoins touchant et bouleversant -, d'un milieu rural tentant de survivre à la modernité.

Ce que j'ai aimé :

Au départ, j'ai remarqué les phrases courtes, précises, sans fioritures. Alain Poissant possède une grande maîtrise de l'écriture. Détaillées en peu de mots, les scènes semblent être vues à vol d'oiseau. Un regard perçant, comme les yeux d'un aigle, traque des images vives dans ce vaste espace, tel un éclair argenté. Chaque cadence, chaque mesure est modelée à une intention pour former un livre court, mais dense.

À cette forme ciselée, l'auteur combine un contour évanescent. Des analepses permettent aux souvenirs d'enfance, aux visions du passé de se juxtaposer au temps présent. Une impression décalée, fugace. Une solitude, un silence traversé d'une rumeur. Dans ce lieu tranquille, où on parle peu, les sentiments se devinent plus qu'ils ne s'expriment. Il ne se passe presque rien, dans ces absences, ce ciel bleu, mais que ce mutisme demeure évocateur. Lorsqu'on vient à parler, on écoute.

Ce roman aborde plusieurs thèmes, dont celui de la ruralité. On nous présente une ferme laitière, de façon plus pragmatique que bucolique. En ce sens, Alain Poissant a un regard lucide sur sa région natale, où l'isolement social et les préoccupations financières sont bien réels. Le métier d'agriculteur est fait de sacrifices, de fierté et de courage. À ce propos, mon père a attiré mon attention sur un texte, Maîtres chez nous, écrit par un cultivateur de notre coin. J'ai trouvé qu'il résonnait avec ce roman : le désir de transmission, la beauté du paysage, ainsi que la réflexion sur un monde en changement, qui est aussi le nôtre.

Extrait favori :

« Aussi loin que remontaient ses souvenirs, il y avait toujours eu des mains dans ses mains, comme il y avait toujours eu des créatures oniriques dans son sommeil. Les mains de sa mère. Les mains de ses grands frères et de ses grandes soeurs. Les mains des épouses. Les mains des enfants. Des petits-enfants. Des arrière-petits-enfants. Les chauds maillons d'une chaîne. »

6 commentaires:

  1. Contente de te voir de retour Topi ! :-)

    Ton billet me renvoie à l'une de mes lectures très récentes : « La lettre à Helga ». Il s'agissait certes d'une autre ruralité, d'un autre amour, mais tout de même, il me semble que ce roman fait un peu écho à celui de Bergsveinn Birgisson.

    Il pourrait donc beaucoup me plaire ! ;-)

    Merci beaucoup pour ce billet et très belle fin de dimanche. :-)

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    1. Merci Marion ! Je suis bien contente que ces problèmes internet soient derrière nous :)

      Alain Poissant m'a étonnée dans sa façon d'aborder la ruralité, car elle sortait de mes références habituelles. J'ai lu son livre deux fois, car je l'ai trouvé à la fois déstabilisant et fascinant.

      Cette « Lettre à Helga » me tente vraiment beaucoup. Je la prends en note pour poursuivre cette réflexion sur notre rapport à la terre !

      Bon dimanche à toi aussi :)

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  2. On suit de près pour cette lecture. Ça fait environ 5 semaines que je l'ai terminé. Il m'en reste un bon souvenir. Je devrais maintenant un peu fouillé ma mémoire pour dénicher les mots justes pour en parler.

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    1. C'est un très bon roman, qui se passe dans ma belle Montérégie ! J'ai très hâte de le redécouvrir à travers tes mots et ton regard :)

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  3. Tu me donnes envie de le lire! Je suis certaine, à lire ton avis, que ce livre me plairait! Merci! :)

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    1. Oh oui ! J'ai vraiment l'impression que ça te plairait :)

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