Quelques projecteurs, une chaise, une forte présence scénique, il n'en faut pas davantage pour établir un lien avec le public. Au milieu d'une scénographie épurée, où le quatrième mur n'existe plus, la troisième édition des Laissés Pour Contes nous en convainc pleinement, ralliant l'assistance autour du thème secret de la peur.
© Patrice Tremblay |
Aux siècles passés, les contes reflétaient les peurs collectives et les différents phénomènes que les gens n'arrivaient pas à s'expliquer. Dans ces contes urbains, la peur ne garde pas la même emprise qu'autrefois. Elle se fait plus intime, privée. Malgré leur caractère unique, les 6 textes choisis pour cette mouture parviennent à créer un effet rassembleur. Ainsi, l'auditoire devient une oreille attentive, prête à accueillir les confidences offertes sur scène.
Le premier récit, L'escalier de la cave, écrit et interprété par Amélie Prévost, tisse un lien avec les peurs ancestrales, en s'attardant au monde de l'enfance. Dans un slam rythmé et senti, elle scande ces craintes profondes et rappelle à la petite fille qu'elle était de ne jamais lui lâcher la main.
Dans Le crotté, l'acteur Martin Tremblay s'immisce dans l'histoire d'un jeune homme poussé par son père à dévaliser une caisse populaire. Le ton nerveux et écorché sert bien l'univers de Patrice Bonneau. Une tension s'installe, alors que le fils est traversé par la peur de ressembler, plus qu'il ne l'aurait cru, à son paternel.
Dans Le crotté, l'acteur Martin Tremblay s'immisce dans l'histoire d'un jeune homme poussé par son père à dévaliser une caisse populaire. Le ton nerveux et écorché sert bien l'univers de Patrice Bonneau. Une tension s'installe, alors que le fils est traversé par la peur de ressembler, plus qu'il ne l'aurait cru, à son paternel.
© Patrice Tremblay |
Anne-Valérie Bouchard fait preuve d'une grande aisance dans La crieuse de Véronique Pascal, une auteure qui nous avait livré un moment aussi savoureux l'an passé. Cette fois, nous faisons la rencontre d'une croqueuse d'hommes, notaire de profession. Devant la frousse d'une vie IKEA, ordonnée et vide de sens, son horloge biologique s'est mise à sonner. Le tout nous est raconté avec beaucoup d'humour par la comédienne.
Les fous rires se prolongent devant l'anxiété amplifiée de Sortir de la ville, dans lequel Michael Richard joue son propre texte. Paniqué à l'idée de quitter Montréal pour une fin de semaine entre amis, il nous entraîne dans son dialogue intérieur, passant de l'ironie à une réflexion intéressante sur la fuite, cette manière d'éviter constamment ce qui le terrorise.
© Patrice Tremblay |
Malgré une amorce un peu floue, la suite du conte Le chêne se précise. Narré avec émotion par Julie Fortin, ce morceau touchant de Pierre-Marc Drouin fait référence à la solidité, puis à la soudaine fragilité d'un père atteint par la maladie. Il sera question des étiquettes apposées aux personnes ayant des troubles mentaux. Sa fille confiera sa difficulté d'aimer, après avoir aperçu la souffrance humaine de si près, sans aucun filet.
Le spectacle se conclut sur une note puissante, avec Zéro gravité du directeur artistique Pierre Chamberland. Effrayé par l'idée d'être différent ou de se faire prendre, Mathieu Lepage incarne avec passion un homme qui porte des vêtements féminins à l'insu de sa copine. Ce récit, qui aborde les doutes d'une manière poétique, nous secoue fortement.
De nouveau, Les Laissés Pour Contes ont tenu leurs promesses, déclinant le thème de la peur avec brio, oscillant entre gravité et convivialité. En attendant la prochaine édition, qui traitera du sujet de l'ignorance, vous pouvez vous glisser en salle jusqu'à demain. Ne ratez pas l'occasion de découvrir la relève des contes urbains !
Les Laissés Pour Contes. Textes de Patrice Bonneau, Pierre Chamberland, Pierre-Marc Drouin, Véronique Pascal, Amélie Prévost, Michael Richard. Mise en scène de Patrick Renaud. À l'Usine C jusqu'au 25 janvier 2015.
Très belle critique. Elle m'a fait regretter de ne pas y être. Je l'ai repérée sur facebook, une personne du milieu du théâtre l'a placée en lien. Je crois que ta critique est appréciée.
RépondreSupprimerOh, tu es bien gentille de m'en informer ! J'ai passé une si belle soirée grâce à ces artistes. Bon dimanche Venise :)
SupprimerChouette de revivre cette belle soirée à travers tes mots!
RépondreSupprimerMerci Lucie ! J'ai très hâte à l'année prochaine, moi aussi :)
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